Une abeille qui butine une fleur de colza potentiellement traitée par des pesticides néonicotinoïdes.

Interdiction de 3 néonicotinoïdes votée par la Commission Européenne

Enfin ! Après plus de 20 ans de lutte, les défenseurs des abeilles remportent une victoire importante. La Commission européenne vient de voter l’interdiction de 3 néonicotinoïdes dans l’Union Européenne. Cependant, d’autres produits tout aussi toxiques sont encore utilisés. Une étude allemande vient de mettre en évidence la disparition de 80 % des insectes volants sur les 30 dernières années en partie à cause de ces “néonics”. Face à cette situation, il devient urgent de revoirnotre modèle agricole basé sur ces produits phytosanitaires.

La Commission européenne s’engage contre 3 néonicotinoïdes

Les néonicotinoïdes sont des pesticides introduits en Europe dans les années 90. Depuis, ils sont utilisés massivement par le modèle agricole dominant. Ce vendredi 27 avril 2018, suite au projet de résolution déposé au Parlement européen en janvier 2018, la Commission européenne a voté l’interdiction de 3 d’entre eux pour tous leurs usages extérieurs. Il s’agit de 3 produits qui subissaient déjà certaines restrictions d’usage depuis 2013 : l’imidaclopride (Gaucho), la clothianidine et le thiamétoxame. 16 pays sur 28 ont voté pour cette interdiction. Il s’agit entre autres de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Italie, des Pays Bas et du Luxembourg. C’est une première victoire pour les abeilles. Dernièrement, une étude allemande datant d’octobre 2017 a mis en évidence la perte de 80 % des insectes volants sur les 30 dernières années. Dans cette étude, les néonicotinoïdes ont été incriminés. Jusqu’à présent, cinq néonicotinoïdes étaient autorisés en Europe dont les trois qui viennent d’être interdits. Ainsi subsistent l’acétamipride et le thiaclopride toujours autorisés. Aussi, cette interdiction ne mettra malheureusement pas fin au déclin des abeilles et, plus généralement, de l’entomofaune.

«Je ne suis pas soulagé du tout par cette décision aujourd’hui de suppression des néonicotinoïdes, sur laquelle nous nous battons depuis 20 ans. Car les trois substances interdites ont été remplacées par d’autres pires encore, notamment le thiaclopride. Le massacre des abeilles continue.», a avancé José Nadan, secrétaire du syndicat des apiculteurs professionnels de Bretagne, et membre de la Fédération française des apiculteurs professionnels.

Un tracteur dans un champ qui répand des pesticides néonicotinoïdes.

Pourquoi a-t’il fallu tant d’années pour arriver à cette interdiction ?

D’après Stéphane Foucard, journaliste au Monde, cette interdiction est une bonne nouvelle mais aussi le signe d’une grave catastrophe réglementaire. Elle intervient après 24 années d’études scientifiques françaises et européennes établissant toutes un lien probable entre les pesticides et la mortalité, la disparition et les troubles comportementaux des butineuses, confirmant les craintes des apiculteurs. Cependant, ces études sont remises en question par les industriels qui invoquent des causes multifactorielles (mauvaises méthodes des apiculteurs, virus ou pathogènes apparus subitement, disparition des fleurs provoquant la famine chez les abeilles…). Ils commandent et financent leurs propres recherches. Bien sûr, celles-ci minimisent l’impact des pesticides. Ainsi, d’études scientifiques en contre-expertises et batailles juridiques, les années passent et les pesticides sont toujours homologués.

Il faut saisir l’occasion de revisiter nos procédures d’homologation et notre modèle agricole

Des études du Comité Scientifique et Technique du Ministère de l’Agriculture (en 2003) et de l’Autorité Européenne de la Sécurité des Aliments (en 2012) aboutissent aux mêmes conclusions. Les tests fournis par les fabricants de pesticides sont le plus souvent très insuffisants. Malgré cela, on utilise toujours ces mêmes tests pour homologuer les nouvelles classes de pesticides.

“Les procédures d’autorisation au niveau européen doivent être revues. Il s’agit pour nous de l’un des aspects importants de notre travail au sein de la Commission spéciale sur les pesticides (PEST).”, explique Michèle RIVASI, membre de la Commission santé publique et environnement.

De plus, puisque les abeilles meurent à cause des pesticides, cela remet en cause les méthodes agricoles utilisées. En effet, 84 % (selon l’INRA) de notre alimentation dépend des pollinisateurs. Notre santé et donc notre survie dépendent de leur sauvegarde.

“Il est à présent indispensable d’amplifier cette dynamique pour reconsidérer notre modèle agricole basé sur une utilisation massive des pesticides. Ils ruinent la biodiversité et constituent un problème majeur de santé publique.”, déclare Michèle RIVASI.

Il faut espérer qu’il n’est pas trop tard…

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 Pour en savoir plus sur les pesticides et les abeilles, vous pouvez consulter nos articles sur le sujet.

Article mis à jour par Sophie Fruleux le 27/11/19.